“Cinq poule rose serpent”

Entretien avec les art-istes Dasha et Sasha

On est Dasha et Sasha (pas Sasha et Dasha mais Dasha et Sasha. C’est important pour nous parce qu’on a remarqué que la plupart du temps les gens citent l’homme avant la femme quand ils parlent d’un couple et on n’aime pas ça), on s’est rencontrés aux Beaux-Arts de Perpignan, Dasha est de Moscou et Sasha d’Ariège.
Ensemble, on a créé le mouvement artistique ISME. Dasha est à la base une peintre, Sasha on sait pas, ensemble on touche à tout.
Habituellement on crée des installations dans lesquelles on présente au même titre de nombreuses de nos pièces plastiques, ainsi que des ready-made ou des objets du quotidien.
On refuse totalement de séparer l’art et la vie, et on refuse aussi tout ce qui nous ennuie.




La Zone : Nous sommes intrigué.e.s par Cinq poule rose serpent, votre post Instagram. Pouvez-vous nous en dévoiler un peu plus?


Cinq poule rose serpent c’est un super jeu qu’on a inventé, il y a des dés qu’on a fabriqué avec du bois et on a peint dessus, il faut les prendre avec les mains, les lancer par terre et ensuite on regarde.
A la base c’était une technique pour aider des artistes en manque d’idées, au besoin ils devaient créer des pièces en respectant les décisions des dés. On en a une autre qui donne des idées en fonction des couleurs des chewing-gums qui sortent des distributeurs automatiques.
On pense qu’un coup de dés jamais n’abolira le hasard mais on aime aussi beaucoup les chewing-gums.

La Zone : Pouvez-vous caractériser, ou expliquer votre projet ISME ?

L’isme c’est un mouvement artistique qu’on a créé en 2015. On y trouve entre autres des compositeurs, des plasticiens, des poètes, des vignerons et des djs.
– iste c’est ce qui reste quand on enlève la partie ennuyeuse d’artiste.
Il y a des gens qui sont dans le mouvement ISME mais on leur a jamais dit du coup ils sont pas au courant.


« Nous on s’appelle isme et si un jours les gens parlent d’ismisme c’est vraiment qu’ils sont trop cons »



Duchamp ne voulait pas que dada devienne un isme à la suite des autres, faudrait donc pas dire dadaïsme mais dada, sauf que tout le monde dit dadaïsme. Nous on s’appelle isme et si un jour les gens parlent d’ismisme c’est vraiment qu’ils sont trop cons.
Dans la construction des mots le suffixe se place à la suite du radical et c’est vrai.
-isme c’est un suffixe et on a déjà parlé de radical dans l’histoire de l’art, mais jamais de suffixe.

La Zone : Votre univers est plein d’humour, d’amour, c’est-à-dire assez doux, tout en étant trash (en tout cas on trouve). Comment vous arrivez à concilier tout ça ?

On concilie tout ça parce qu’on fait complètement l’amalgame entre notre univers artistique, notre production et notre vie, du coup dans nos expositions on parle un peu de tout ce qui nous arrive ou qui nous intéresse, parfois c’est doux et beau et d’autres fois c’est triste ou violent, on a pas envie de se spécialiser sur un sujet ou une technique, ça nous ressemblerait pas.

La Zone : Quelle a été votre histoire avec la scène? Au sein du collectif PailletteS et maintenant de votre côté? Pourquoi la scénographie a-t-elle autant d’importance pour vous?

Notre histoire avec la scène c’est que quand on est arrivés à Marseille, en 2016, on n’a pas trouvé beaucoup d’événements intéressants, la plupart des soirées où on allait ne nous plaisaient même pas du tout.
Alors, avec Léa, Gaëtan et Pierrick, on a commencé à organiser des soirées qui nous ressemblaient un peu plus, on les a appelées  »paillettes ».
L’idée des paillettes c’est de mélanger l’art et la fête grâce à la scénographie ou la performance, c’est ne plus limiter la fête à danser sur de la musique mais en faire quelque chose de plus complet, créatif et vivant.
On a commencé à mixer pour faire les warm up dans nos soirées et puis on a continué. On joue parfois en tant que Dasha et Sasha ou bien dans  »paillettes fait son happening » avec les autres, dans ce cas là c’est un DJset à 5 agrémenté d’un joyeux bordel.
Avec Antoine et Alex on a aussi fait partie du groupe hardcore  »Provence Évolution Soccer » et on organise les soirées ABRIBUS, la culture rave, le hardcore et le gabber sont très importants pour nous et nous servent peut être aussi d’exutoire.

La Zone : Est-ce que les soirées queer organisées avec PailletteS, ou tout simplement celles auxquelles vous participez, vous semblent importantes dans le paysage nocturne des villes où vous les avez organisées (Marseille, puis Paris)?

Faut savoir qu’on n’a jamais dit organiser des soirées queer avec paillettes, on organise juste des soirées paillettes. On est conscient que nos événements sont vus comme tels par pas mal de monde et ça nous dérange pas mais on ne l’a jamais revendiqué.
Sinon bien sûr que c’est important, mais plus largement on supporte tout ce qui peut participer à faire évoluer les mentalités et à faire barrage aux réactionnaires.

La Zone : Pourquoi combiner art contemporain, scénographie et pratique musciale ? Est-ce pour vous totalement cohérent ou difficile à faire tenir ensemble ?

Pour nous c’est très cohérent et pas difficile (parfois un peu fatiguant par contre), on s’est jamais dit qu’on aurait telle ou telle activité, ça vient naturellement et on ne se pose pas de question, on fait juste des choses qu’on a envie de faire. Aussi l’art et la musique se marient très bien, quant à la scénographie elle nous est tombée dessus, c’est simplement le moyen le plus efficace pour présenter le travail d’un artiste dans le cadre d’un événement festif.


On fait aussi beaucoup d’autres choses, on aime faire la cuisine, parfois on va à la montagne, on fait des vêtements et des tatouages, on va à des manifestations et on danse beaucoup.

La Zone : Quel est votre rapport à Marseille ? Avez-vous perçu un changement ces derniers temps, au niveau culturel en général ?

Marseille nous a accueillis à bras ouverts et on l’aime très fort.
On savait pas vraiment à quoi s’attendre en venant ici à part qu’il y fait beau et que les loyers sont abordables, on n’était pas du tout conscients qu’on arrivait au moment où tant de choses allaient se passer. On est très heureux de participer à cette aventure et de voir plein de personnes intéressantes nous rejoindre ces dernières années. On se sent comme dans une grande équipe où les gens se soutiennent, s’intéressent aux autres et s’inspirent entre eux. Il faut dire que la ville ne fait rien pour nous aider et bien au contraire, peut être que ça nous pousse encore plus à nous entraider et que ça nous donne l’envie de continuer.


« On espère que cet attrait pour Marseille et les belles chose qui s’y passent vont continuer en respectant son âme et sans l’aseptiser. »


On ressent une certaine liberté quand on vit à Marseille, quelques chose qui nous plaît aussi c’est l’absence de superficialité dans les milieux nocturnes et artistiques, ici, il n’y a personne qui vient à des événements pour se montrer parce qu’il n’y a personne à qui se montrer.
On espère que cet attrait pour Marseille et les belles choses qui s’y passent vont continuer en respectant son âme et sans l’aseptiser.

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